Comment lutter contre l’illectronisme en CHRS ?
Le numĂ©rique et la tĂ©lĂ©phonie font dĂ©sormais partie intĂ©grante de nos quotidiens, mais tout le monde n’en profite pas de manière Ă©gale. Depuis quelques annĂ©es, une nouvelle compĂ©tence clĂ© s’est imposĂ©e, en plus de la lecture, l’Ă©criture ou le calcul : la maĂ®trise des technologies de l’information et de la communication . Cette compĂ©tence a un impact majeur sur une partie de la population, affectĂ©e par ce que l’on appelle aujourd’hui « l’illectronisme ».
Qu’est-ce que l’illectronisme ?
Le terme “illectronisme” fait son entrée officielle dans le dictionnaire Larousse, en 2020 suite à la pandémie du Covid 19. Ce terme désigne « l’état d’une personne qui ne maîtrise pas les compétences nécessaires à l’utilisation et à la création des ressources numériques ».
En France, l’illectronisme concerne un grand nombre de personnes en situation de prĂ©caritĂ©. Près de 11 millions de personnes en Europe sont mal logĂ©es, et la France n’Ă©chappe pas Ă cette rĂ©alitĂ©. En 2018, plus de 566 personnes sans abri sont dĂ©cĂ©dĂ©es dans la rue, et en 2012, l’INSEE comptabilisait 143 000 sans domicile en France, un chiffre qui a augmentĂ© de 50 % en 11 ans . De plus, malgrĂ© les 44 691 places disponibles dans les Centres d’HĂ©bergement et de RĂ©insertion Sociale (CHRS), la demande dĂ©passe largement l’offre.
Les personnes accueillies en CHRS cumulent très souvent ces différents paramètres et font donc parties des plus vulnérables par rapport à l’exclusion numérique.
Le défi de la dématérialisation dans les CHRS
On observe également que les travailleurs sociaux de terrain, tout comme les directions, subissent la dématérialisation et sont peu outillés pour anticiper sereinement la probable transformation de leur métier induite par le développement du numérique. Cette situation représente un risque de perte d’autonomie qui renforce l’exclusion des publics les plus fragiles.
Dans certains CHRS, plusieurs professionnels ne maîtrisent pas du tout ou pas suffisamment l’utilisation de l’outil informatique, ce qui induit une certaine crainte voire pour certains un manque d’intérêt et une résistance au changement des pratiques professionnelles.
Force est de constater que la double-révolution administrative et technologique creuse les écarts entre les individus à l’aise avec les technologies de l’information et de la communication et ceux qui en sont éloignés. L’exclusion numérique traduit les disparités d’accès au digital selon les territoires et les populations.
Qui sont les personnes les plus touchées ?
Parmi ceux ne se connectant jamais à internet, huit personnes sur dix (81%) ont 60 ans ou plus. Il s’agit essentiellement de personnes à la retraite (72%). Les femmes sont surreprésentées (60%, + 8 points par rapport à l’ensemble de la population), tout comme les personnes seules (61%), et les non diplômés (59%). Les non internautes ont un niveau de vie plus faible (34% appartiennent à la catégorie des bas revenus et 34% aux classes moyennes inférieures). De plus, les Hauts-de-France présentent un contexte propice à l’illectronisme. En effet, ruralité, pauvreté, chômage et illettrisme, la région semble particulièrement concernée par l’illectronisme puisque les poches de ruralité et de la pauvreté se superposent très souvent à celles d’exclusion numérique, bien qu’il n’existe pas de chiffres en région permettant de quantifier le phénomène d’illectronisme
Dans une étude réalisée par Yves-Marie Davenel, Docteur en anthropologie, moins de 10% des intervenants sociaux interrogés déclarent avoir reçu une formation au numérique dans le cadre professionnel ou au cours de leur formation initiale. Seulement 30% des intervenants sociaux sont en capacité de diriger un usager ayant des lacunes numériques vers un acteur proposant une formation adaptée. 83% des intervenants sociaux jugent le numérique indispensable dans leur pratique professionnelle, et 58% le jugent indispensable dans le parcours d’un usager.
Formation des professionnels et accompagnement des résidents
Comment donc accompagner le personnel et les personnes accueillies en CHRS vers une plus grande autonomie dans leurs différentes démarches administratives face au développement numérique ?
1. Ancien personnel encadrant
- Organisateur des formations pour les moniteurs , accompagnateurs et conseillers afin de les prĂ©parer Ă aider les rĂ©sidents dans l’utilisation des outils numĂ©riques.
2. Séances de formation pour les résidents
- Proposant des sessions de formation aux rĂ©sidents sur l’utilisation des services en ligne de l’État (impĂ´ts, CAF, sĂ©curitĂ© sociale, PĂ´le emploi, etc.).
3. Equiper les CHRS de réseaux WIFI
- Installer des réseaux WIFI dédiés aux résidents pour faciliter leur accès aux services en ligne.
4. Mettre des ordinateurs en libre-service
- Fournir des ordinateurs en libre-service pour permettre aux rĂ©sidents d’accĂ©der Ă Internet et d’utiliser les outils numĂ©riques nĂ©cessaires Ă leurs dĂ©marches.
5. Distributeur des Pass numériques
- Permettre aux rĂ©sidents de bĂ©nĂ©ficier d’un Pass numĂ©rique , qui leur permet d’accĂ©der Ă des formations et Ă des services d’accompagnement. Ce chĂ©quier de 10 pass , d’une valeur totale de 100 € , offre un soutien financier prĂ©cieux pour les plus vulnĂ©rables.
L’illectronisme : un enjeu de rĂ©insertion sociale
Somme toute, si les professionnels de l’Action sociale sont aujourd’hui bien souvent les premiers acteurs face aux difficultĂ©s des usagers engendrĂ©s par la dĂ©matĂ©rialisation des services publics, l’accompagnement des publics fragiles Ă ce processus semble ĂŞtre le parent pauvre de la rĂ©flexion sur la place et le rĂ´le des technologies de l’information et de la communication au sein du travail social. Bien que l’informatique et le numĂ©rique soient entrĂ©s dans les pratiques professionnelles des travailleurs sociaux depuis une dizaine d’annĂ©es, cette problĂ©matique particulière fait peu sujet.
Les revues spécialisées traitent bien du numérique et de l’Internet des objets, en particulier au sujet de l’accompagnement des personnes dépendantes (personnes âgées, handicap), mais peu des potentialités du numérique ou des risques d’exclusion sociale et de non recours aux droits liés à un non équipement ou à une non maîtrise des outils.
L’illectronisme, Ă©galement appelĂ© illettrisme numĂ©rique , est un vĂ©ritable handicap social pour les personnes accueillies en CHRS. Mettre en Ĺ“uvre des solutions pour garantir l’ inclusion numĂ©rique ne relève pas seulement du principe d’Ă©galitĂ©, mais constitue aussi un outil indispensable pour la rĂ©insertion sociale . Il est crucial de faire du numĂ©rique un levier d’Ă©mancipation et non un facteur d’exclusion.
L’ère du numĂ©rique est dĂ©jĂ lĂ . Il est donc essentiel de l’accepter, de l’intĂ©grer, et de mettre en place des mesures d’accompagnement pour que numĂ©rique et inclusion sociale aillent de paire.
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